Littérature et référencement (suite)
Et oui, même si la littérature et le référencement semblent éloignés, on peut trouver des ponts secrets entre ces deux disciplines...
Comment Montaigne peut-il jeter une lueur singulière sur le travail du référenceur ? Vous le saurez en lisant ce qui suit !
Le référenceur, le soir venu, éteint son ordinateur, allume une chandelle et ouvre les Essais de Montaigne. Il sait en effet que dans les grands ouvrages, il trouvera de quoi s’améliorer dans son travail.
Voici une pensée de Montaigne qui peut justement frapper au cœur un spécialiste du référencement freelance comme l’est votre humble serviteur.
Montaigne remarque l’abondance des ouvrages de commentateurs qui prennent pour objet les livres des grands auteurs (Platon, Aristote…). Ces ouvrages visent à éclairer le sens de tels ou tels passages de la Métaphysique d’Aristote, ou de la République de Platon. Ils renvoient donc tous à ces livres, et en font une exégèse (ou glose).
Mais cela prend une dimension supplémentaire lorsque les exégètes se mettent à prendre pour objets de leurs écrits les ouvrages d’autres commentateurs.
Cela a un effet à long terme : au lieu d’éclaircir le livre qu’ils ont pour tâche de commenter, tous ces commentaires finissent par obscurcir, de par leur abondance, le sens de celui-ci : « Le centième commentaire le renvoie à son suivant, plus épineux et plus scabreux que le premier ne l’avait trouvé. Quand est-il convenu entre nous : ce livre en a assez, il n’y a désormais plus que dire » (les Essais, XIII).
Ainsi « au rebours nous obscurcissons et ensevelissons l’intelligence : nous ne la découvrons plus qu’à la merci de tant de clôtures et barrières ».
Montaigne prend l’image des vers à soie : tous ces commentateurs, renvoyant à l’œuvre originelle, finissent par l’envelopper tel un cocon de soie, et l’esprit s’y étouffe : « les hommes méconnaissent la maladie naturelle de leur esprit : il ne fait que fureter et quêter, et va sans cesse tournoyant, bâtissant et s’empêtrant en sa besogne, comme nos vers à soie et s’y étouffe ».
La conclusion, magnifique, « nous ne faisons que nous entregloser » m’a interpellé dans mon travail de consultant seo de Lyon. En effet, qu’est-ce que le Web 2.0 sinon un ensemble de sites renvoyant les uns aux autres via des liens hypertextes ? Et qu’est-ce que le référencement, sinon l’organisation d’un système de renvois, par l’organisation de campagnes de netlinking massives.
Voyons cela en détail : un site est construit, proposant un vrai service et un vrai contenu : c’est l’œuvre « originelle ». Son propriétaire décide de le référencer. Que va faire le consultant SEO auquel il va faire appel ?
Tout d’abord créer des petites descriptions sur des annuaires : les commentaires, renvoyant à l’oeuvre originale (le site). Puis il va aller plus loin, en créant des sites uniquement pensés pour accueillir des articles contenant des liens vers le site. Ce sont de véritables livres de commentateurs !
Ainsi, Google, de par son algorithme qui favorise les sites bénéficiant de nombreux renvois (liens), amène le Web à se remplir peu à peu de sites présentant non pas des contenus originaux, mais de commentaires sur ceux-ci : c’est le règne du bavardage !
Ainsi, des centaines de sites parlent de vente de voiture à Lyon pour pointer vers les quelques rares vrais sites proposant ce service. Bientôt, vu la concurrence effrénée que se livrent ces entreprises du point de vue du référencement, il en existera des milliers !
Et l’on est obligé de faire cela, sinon le site n’aura plus de visibilité… Le référenceur est obligé de commenter, et de tisser son cocon de ver à soie autour du site. Certains emplissent même le web de splogs, composés de textes sans aucun sens rédigés automatiquement. Le Web 2.0 va-t-il bientôt étouffer sous le poids de ces milliers d'articles sans intérêt renvoyant les uns vers les autres ?
C’est le but de Google que de chercher à lutter contre ces mauvaises pratiques. La mise à jour Panda en est un exemple. Mais il est à noter que c’est l’algorithme de Google qui favorise cette inflation, ce qui fait qu’aucune mise à jour ne pourra rien y faire. Tant que Google adoptera le postulat scientifique selon lequel plus un site est cité, plus il est de qualité (de la même manière qu’un article scientifique est considéré comme de meilleure qualité parce qu’il est cité dans de nombreuses revues), alors le Web grandira, ou plutôt enflera, en se remplissant de sites vains. Résultat : actuellement, on dénombre 130 000 milliards de pages !
Voilà ce que la lecture de Montaigne me suggère. Le scepticisme est également une excellente doctrine pour un référenceur, ainsi que vous pourrez vous en rendre compte à la page suivante
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